Menu utilisateur

La Prédation

A propos

La Prédation

Ecrit par Aye-Aye environ... dans Bio-Scène le 25 oct 2015

Dans ce cas de prédation pour le moins surprenant, cette jeunes couleuvre à collier – Natrix natrix – a-t-elle eu la bouche plus grosse que le ventre ? Rien n'est moins sûr… - PNR de la Brenne - Juillet 2015


Statut : En cours de relecture / A valider scientifiquement

"Et moi dans tout ça ?" => Vous êtes invités à participer,
notamment en nous aidant à illustrer les différents contenus & articles proposés.


 Prédation • Concurence • Coopération 

La prédation est une adaptation comportementale et un mode de nutrition adoptés par une classe d’animaux : les prédateurs. Assez évolués, ces derniers sont équipés d’appareils spécialisés pour l’attaque : sensoriels, locomoteurs, etc…

Les proies prélevées par tout prédateur fournissent donc la matière organique nécessaires à leur métabolisme.

En Guyane française, comme partout ailleurs, ce ne sont pas forcément les gros qui mangent les plus petits qu'eux…


Le terme prédateur nous évoque plutôt le monde animal et plus particulièrement renvoie aux grands carnassiers tels que loups, fauves ou rapaces, dont la puissance frappe notre imaginaire collectif. Cependant, même si la vue d’une proie dévorée peut paraître effroyable et bestiale, il est nécessaire de comprendre que ce rôle est non seulement bénéfique mais aussi indispensable à tous les niveaux (sauf probablement si l’on se place du point de vue de l’individu qui devient proie). Cela permet en fait de conserver un équilibre constant entre une nourriture disponible et les populations qui fréquentent un même habitat.

Prédateur ou non ? En opposition aux prédateurs, les végétaux synthétisent la matière par l’intermédiaire de la photosynthèse (issue de la lumière) ou chimiosynthèse (issue de réactions chimiques). Notons que certains végétaux complètent leur synthèse grâce à des apports extérieurs ; les plantes carnivores, peuvent être considérées alors comme des prédateurs, bien qu’elles ne fassent pas partie du règne animal.

Drosera rotundifolia ayant "capturé" un criquet •

Grâce à ce principe d'interactions, peuvent donc cohabiter une multitude d’espèces dans un même écocsystème et chaque population peut se développer en assurant l'équilibre de l'ensemble ; en effet, ce ne sont pas les prédateurs qui compromettent le plus les populations d'espèces, car leur nutrition est en permanence soumise aux aléas de la chasse. Ils doivent donc pour parvenir à se nourrir d'une part rechercher leurs proies (chasse active) ou l’attendre (chasse à l’affut, embuscade), puis d'autre part la capturer.

Pour le cas des prédateurs situés au sommet de la chaîne alimentaire, les proies ne sont pas forcément plus fortes, mais au moins ont-elles d'autres particularités qui leur donnent des chances de s'en sortir : agiles, véloce ou plus rusées que l’attaquant. Notons enfin que le mimétisme est aussi une réponse adaptative particulièrement efficace et qui permet purement et simplement sinon d'éviter, au moins de limiter les risques de la prédation (Voir notre article à ce sujet).

Ainsi, pour un résultat parfois médiocre, beaucoup d’énergie doit donc en réalité être dépensée dans le geste de la prédation. C’est pourquoi l'intéressé connaît régulièrement des échecs assortis de périodes de jeûnes. Sa tendance naturelle sera alors est privilégier logiquement la stratégie d'économie maximale d'énergie : il sera donc préférable pour lui de chercher les proies les plus faciles à capturer (animaux faibles, malades, jeunes inexpérimentés, etc…).

Ainsi donc, la sélection naturelle (permettant aux individus soit plus forts – ou plus largement les mieux adaptés – de rester en vie) est le revers positif de l'acte de prédation. Non seulement l’équilibre est ainsi globalement respecté mais les mieux adaptés vont pouvoir transmettre leurs aptitudes et expériences à leur descendance…

Le Balbusard pêcheur – Pandion haliaetus – est spécialisé dans la pêche, qui constitue quasiment 100% de son régime alimentaire


En réalité, au-delà de cette image du puissant prédateur, des petits carnassiers très voraces comme une simple coccinelle, des oiseaux ou des araignées représentent la très grande majorité du groupe des prédateurs. Leurs proies sont des animaux phytophages (se nourrissant de végétaux), pour le coup très abondants eux aussi dans la nature. Là encore, l'équilibre est la règle. La coccinelle, pour rester sur le même exemple, n’a qu’à se déplacer sur des feuilles pour se nourrir de pucerons ou cochenilles. Ces animaux, plus petits – et souvent négligés dans nos représentations sur la prédation – sont aussi indispensables et composent un maillon central de la chaîne alimentaire.

 

La prédation peut donc être considéré, en dehors de tout jugement "moral" comme un acte normal et nécessaire dans les interaction entre les espèces. Les prédateurs des phytophages sont eux-mêmes les proies des maillons supérieurs (oiseaux, par exemple) et ainsi de suite jusqu’au sommet du processus qui nous permet d’arriver aux grands carnassiers. Surtout, aucun des maillons ne peut être considéré comme quantité nulle et un seul élément, supprimé ou du moins artificiellement affaibli et c’est alors toute la chaîne qui s’en trouve perturbée. Il est donc primordial de retenir que tout écosystème fait obligatoirement intervenir tout à la fois des prédateurs et des proies. Sauf peut-être à considérer le cas de l’homme qui, pour sa part se place trop souvent en « super-prédateur » et qui, de fait, a de plus en plus tendance à s’émanciper (ou à se croire au-dessus) de l’écosystème.

Le cas de l’homme est en effet plus ambiguë dans son écosystème qui est désormais global : il peut à la fois rentrer dans ce définition "naturelle" de prédateur et en même temps se doit d’être considéré quelque part ailleurs dans ce schéma de cohérence global.Homo economicus, se couvre sous cette "réalité biologique" pour prédater tout ce qui passe à sa porté, sans se priver d'éliminer tout ceux qui de son point de vue lui font directement "concurrence" (Voir notre dossier : le Loup de retour en France). C'est ainsi qu'aujourd’hui, ayant atteint un tel niveau de puissance, il influe désormais plus ou moins directement sur tous les écosystèmes de la biosphère et sur leur devenir de toutes les espèces sur la planète. Peut-être que les Homo sapiens que nous sommes censés être devraient réfréner cet atavisme de prédation et faire montre "d'un peu plus de sagesse" vis-à-vis du reste du vivant…
Pour en savoir plus, consulter notre article "Pas d'évolution sans co-évolution".

Paradoxalement, le manque de prédateur est aussi préjudiciable à un milieu

Souvent, faute de connaissances, par maladresse, malveillance ou de façon volontaire (un intérêt marcantile de court terme par exemple), les activités humaines participent directement au déséquilibre d’un milieu  et ce de plusieurs façons : par le prélèvement pour le commerce d'une espèce de son milieu originel, jusqu'à la menacer de disparition et, à l'opposé, par l’introduction d’espèces exotiques dans un habitat où elles n’ont pas leur place.

Prenons l'exemple révélateur de la Tortue de Floride - Trachemys scripta elegans – commercialisée en masse comme animal de compagnie et qui, devenue trop volumineuse voire agressive se trouve relâchée dans la nature par des particuliers bien peu conscients du risque encouru pour les espèces indigènes. L'animal nouvellement introduit peut alors être pourvu d'un avantage et de moyens particuliers pour s’adapter (aucun prédateur, par exemple), tant et si bien qu’elle se reproduit aisément, colonisant toujours plus d'habitats et rompant ainsi l’équilibre qui s'est construit très lentement au fil du temps. Notre tortue locale, la Cistude d'Europe – Emys orbicularis – pour ne citer qu'elle, s'en trouve ainsi directement menacée par la compétition imposée par le nouvel arrivant (en plus de la perte de son milieu également provoquée par l'homme !).

 

La Tortue de Floride (Trachemys scrypta elegans) à gauche viens concurrencer notre Tortue indigène la Cistude d'Europe (Emys orbicularis), à droite. dont la situation au plan national est désormais préoccupante

Parution de cet article dans sa forme initiale : Novae environnement - Octobre 1994 dans le cadre du dossier "le loup de retour en France"

Démarche non mercantile de valorisation de la biodiversité à travers la diffusion des connaissances, la diversité des points de vue et l'usage coopératif du multimédia.