Beaucoup d’idées fausses sont répandues à son propos, reposant sur une première impression d’exubérance (richesses inépuisables), de densité (milieu impénétrable), d’étendues infinie (monotonie et homogénéité).
En réalité
« La forêt Guyanaise est une forêt de terre ferme, sur un relief de collines disséquées par une multitude de petits cours d’eaux (criques). On y pénètre à partir de fleuves et de rivières navigables dont les berges sont généralement « cicatrisées » par une végétation en rideau. C’est là que réside le fameux mythe de l’enfer-vert. Mais au-delà des berges, la forêt n’offre pas d’obstacle par elle-même. En revanche, le relief rend la marche physiquement éprouvante sous un climat humide et chaud.
Contrairement à l’idée répandue, cette forêt n’est pas homogène. Elle présente des différences selon les régions (cf. JJ de Granville) et localement en fonction du relief (pentes de collines, bas-fonds, etc…).
Elle ne grouille pas d’espèces hostiles. Le principe général caractérisant la biodiversité de ce milieu consiste en une grande dispersion des populations de chacune des innombrables espèces. De plus, l’homochromie et le mimétisme sont des phénomènes très répandus parmi les espèces animales qui les rendent peu perceptibles pour un œil non exercé. Mais les rares espèces rencontrées ont plutôt tendance à s’enfuir au passage des hommes.
La forêt constitue un système fragile dont le maintien repose sur la continuité et la rapidité des cycles de matière et d’énergie. Il n’y a pas d’accumulation, pas de sols profonds, comme c’est le cas dans les forêts tempérées. Les grands arbres reposent directement sur la roche ou les produits de sa dégradation par une grande galette de racines horizontales.
La forêt n’est pas seulement une collection de végétaux de diverses tailles. Tous les êtres vivants, des bactéries aux grands arbres participent au fonctionnement global. C’est pourquoi la biodiversité n’est pas seulement un résultat, mais une condition de l’existence de ce milieu.
La forêt de Guyane appartient actuellement à un vaste ensemble guyano-amazonien. Cet ensemble a connu dans le passé des phases de régression considérables en raison de variations globales du climat et s’est reconstitué à partir de « zones de refuges ».
La Guyane a constitué l’une de ces zones.
Jean-Pierre Gasc,
Museum National d’Histoire Naturelle. 1995